4 Potemkiniens au Championnat de Paris

Coubertin, 22h45. La 8e ronde du championnat de Paris touche à sa fin.

600 joueurs participent à l’événement, répartis en 4 tournois :

* Le tournoi des Maîtres, avec 10 grands maîtres, dont la championne du monde en titre, la Chinoise Hou Yifan (2633 Elo), sérieusement bousculée pendant ces huit jours.

* Le tournoi A, avec Laurent et Raphaël.

* Le tournoi B, avec Ahmed et moi.

* Le tournoi C.

Les parties ont été lancées à 18h30. La plupart sont achevées, mais il reste encore quelques stakhanovistes en pleine bataille, dont Laurent.

Ahmed et Raphaël ont terminé depuis longtemps.

Je viens de finir. Une partie qui, pour mon niveau, et sur un malentendu, aurait presque des allures d’immortelle… bon, surtout si on oublie les coups 14, 31 et 33....

J’y reviendrai dans un autre article.

Ce tournoi est éprouvant.

Neuf rondes. Beaucoup d’adversaires coriaces, résilients, très bien préparés, solides techniquement — bref, extrêmement difficiles à battre.

Dimanche et lundi : doubles rondes. Heureusement, deux *byes* étaient autorisés (on peut sauter une ronde en marquant un demi-point), ce qui m’a évité l’écroulement total.

Pas de canicule cette année, mais tout de même des journées chaudes. Pas de climatisation. Et 600 cerveaux en surchauffe dans la même salle…

Mardi, mercredi, jeudi : rondes vespérales à 18h30.

Il fut un temps où j’enchaînais journées de boulot et rondes le soir. Très mauvaise idée. À ne jamais reproduire.

Ce tournoi est excitant.

La cadence (1h30 + 30 secondes par coup) permet de réfléchir — vraiment réfléchir.

La majorité des joueurs viennent pour jouer, pas pour annuler rapidement. Résultat : des parties ouvertes, tendues, souvent imprévisibles.

Et donc, des opportunités.

De belles idées à poser sur l’échiquier. Parfois même, un peu de magie.

Une partie ne se résume pas à un gain comptable, heureusement.

Il arrive qu’on perde la guerre, mais qu’on remporte de belles batailles — sabre au clair — qui restent gravées dans les mémoires.

À défaut de figurer dans les mornes bases de données de la FIDE.

This is the end

Ahmed et moi ne jouons pas la dernière ronde.

Laurent et Raphaël, eux, sont encore en train d’en découdre
(note post mortem : ils ont tous les deux gagné)

Le tournoi s’achève.

Nous reviendrons....

Nous sommes, après tout, de modestes conquérants de l’inutile.

Lionel Terray